Discussion sur l’encéphalomyélite myalgique avec la Dre Nina Muirhead
Le 9 mars 2021, l’IALA a invité la Dre Nina Muirhead à discuter de l’encéphalomyélite myalgique. Chercheuse médicale, chirurgienne et éducatrice, la Dre Muirhead a reçu un diagnostic d’encéphalomyélite myalgique en 2017. Dans ce webinaire de 60 minutes, elle aborde le diagnostic et la prise en charge de l’encéphalomyélite myalgique, le lien entre celle-ci et la COVID-19 de longue durée, ainsi que les recherches en cours.
Qu’est-ce que l’encéphalomyélite myalgique?
L’encéphalomyélite myalgique (EM), anciennement appelée syndrome de fatigue chronique (SFC), est une maladie dévastatrice, chronique et complexe qui touche plusieurs systèmes et appareils de l’organisme. Environ 600 000 personnes souffrent d’EM au Canada, le ratio femmes-hommes étant de 4:1 (semblable à celui de la sclérose en plaques). Elle peut toucher les enfants, les adolescents et les adultes de tout âge. Environ 80 % des cas sont dus à une infection virale.
Comment diagnostiquer l’EM?
Il n’existe actuellement aucun biomarqueur de l’EM, mais un diagnostic clinique peut être posé en appliquant les critères du consensus canadien (en anglais seulement). Les patients atteints d’EM se plaignent souvent d’un épuisement extrême qui n’est pas soulagé par le repos, ainsi que de douleurs ou d’un sentiment général de malaise qui ne disparaît pas.
Le malaise après effort est la principale caractéristique qui distingue l’EM des autres causes de fatigue. Le malaise après effort est souvent caractérisé d’« abattement », de « poussée » ou de « rechute », et peut être déclenché par un effort cognitif ou physique même minime. « [Je croyais qu’une] personne devait fournir un gros effort, comme courir un marathon ou piquer un sprint, pour ressentir ce malaise. Mais en réalité, le simple fait de se brosser les dents […] peut suffire. », explique la Dre Muirhead. Les symptômes courants de cette maladie invalidante comprennent les troubles du sommeil, les symptômes cognitifs et neurologiques, l’intolérance orthostatique, le syndrome du côlon irritable, des problèmes cardiaques, un dérèglement de la température corporelle, des changements du système immunitaire, des maux de tête, des douleurs corporelles et articulaires, et une sensibilité à la lumière et au bruit.
Quelles questions poser aux patients?
En général, les patients qui consultent ne disent pas qu’ils ont un malaise après avoir fourni un effort. Ils disent plutôt qu’ils ne vont pas bien ou qu’ils doivent changer leurs habitudes . Les questions suivantes peuvent aider à établir un diagnostic :
- Comparativement à avant, à quelle fraction de vos capacités fonctionnez-vous?
- Que pouviez-vous faire avant, mais plus maintenant ?
- Quel est votre nombre d’heures productives par jour ou par semaine ?
- Combien d’heures par jour pouvez-vous passer debout?
- Que se passe-t-il si vous exercez une activité physique ou mentale que vous pouviez réaliser auparavant?
- Qu’êtes-vous capable ou incapable de faire lors d’une bonne journée? Et lors d’une mauvaise journée?
- Vos symptômes apparaissent combien de temps après avoir fourni un effort mental ou physique? Et combien de temps vous faut-il pour vous en remettre?
Dans ce webinaire, la Dre Muirhead recommande aux cliniciens de faire une anamnèse approfondie, de poser un diagnostic, d’inciter au repos et au respect de ses limites, et de déceler toute affection concomitante courante, comme le syndrome de tachycardie orthostatique posturale (STOP), la fibromyalgie, le syndrome du côlon irritable et le syndrome d’activation mastocytaire (SAMA). Elle recommande également de prendre en charge les symptômes de manière efficace afin d’améliorer autant que possible la qualité de vie des patients. Le plus important est de faire preuve de compassion et d’empathie lorsqu’on rencontre des patients atteints d’EM.
« Les recherches actuelles et futures sur l’encéphalomyélite myalgique sont emballantes, ajoute la Dre Muirhead. Nous sommes sur le point de trouver des biomarqueurs. La pandémie a rapproché les gens partout dans le monde : nous échangeons des données massives, l’intelligence artificielle se développe de manière exponentielle, nous avons amélioré les examens d’imagerie et de neuroimagerie, et nous en savons plus sur l’épidémiologie ».
Résumé
- L’EM est une maladie dévastatrice, chronique, complexe et hétérogène qui touche plusieurs systèmes et appareils de l’organisme.
- Après un effort physique ou cognitif, on observe un « abattement » ou une poussée marquée des symptômes, qu’on appelle « malaise après effort ». La recherche montre que, dans le cas de cette maladie, l’exercice et les programmes axés sur l’activité physique peuvent aggraver l’état des patients au lieu de l’améliorer.
- L’« épuisement neuroimmun » est un symptôme pathognomonique de la maladie. La gravité des symptômes peut fluctuer d’heure en heure, de jour en jour, de mois en mois ou d’année en année.
- L’incapacité à reconnaître et à diagnostiquer l’EM peut nuire aux patients. Conseiller à tort de suivre une thérapie par exercices de plus en plus intenses ou un programme axé sur l’activité physique, ou même dire au patient d’ignorer ses symptômes (ils les ont souvent ignorés depuis bien trop longtemps lorsqu’ils consultent), peut être très préjudiciable et aggraver la maladie de façon permanente.
- Le soutien des amis et de la famille ainsi que des employeurs peut être très utile. Si le patient est d’âge scolaire, la direction de l’école et les enseignants doivent aussi être informés.
- Le diagnostic précoce, le repos et le respect de ses limites, la prise en charge des symptômes ainsi que le soutien en lien avec les incapacités peuvent réduire la morbidité.
Merci à la Dre Muirhead et à la coanimatrice Sabrina Poirier d’avoir participé à ce webinaire important et instructif!
Lire la suite : Regarder l’enregistrement du webinaire (en anglais seulement)
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