Rendre le sport et les loisirs plus inclusifs
En bref
L'enjeu
Près de 30 % de la population canadienne vit avec une forme ou une autre de handicap. Cependant, les personnes en situation de handicap ne représentent qu’environ 2 % du milieu de la recherche universitaire. Ce déséquilibre illustre l’ampleur des obstacles auxquels elles se heurtent pour participer pleinement au système de financement de la recherche en santé.
La recherche
Le Comité consultatif externe sur l’accessibilité et le capacitisme systémique des IRSC a été créé en 2022 pour prodiguer des conseils sur la façon de rendre le financement de la recherche en santé accessible à l’ensemble du milieu de la recherche. En sa qualité de membre du Comité et de personne en situation de handicap, Danielle Peers, de l’Université de l’Alberta, donne des renseignements précieux sur les obstacles que doivent surmonter les chercheuses et chercheurs en situation de handicap et sur la façon d’y remédier.
Les retombées
Le Comité a fourni aux IRSC des conseils sur la façon de tenir des réunions entièrement accessibles et de préparer des documents de mobilisation accessibles. Il a également participé à l’élaboration d’un chapitre du Plan des IRSC sur l’accessibilité et oriente l’élaboration d’un plan d’action pour lutter contre le capacitisme afin de s’attaquer à ce problème aux IRSC et dans le système de financement de la recherche en santé.
S’identifiant à la fois non binaire, queer, d’ascendance coloniale et ayant un handicap, Danielle Peers, anciennement athlète paralympique, se consacre aujourd’hui à son rôle d’entraîneur, à ses projets comme multiartiste, à l’organisation communautaire ainsi qu’à sa carrière de scientifique de haute distinction.
Membre du corps professoral de l’Université de l’Alberta, Danielle Peers met ses diverses identités à contribution afin d’aider à changer la façon dont la société perçoit les personnes en situation de handicap, en particulier celles qui font partie de différentes communautés privées d’équité.
« On aborde souvent le handicap sous l’angle de l’incapacité ou de l’inaptitude, comme s’il s’agissait d’un problème du corps ou de l’esprit de la personne. Et c’est aussi le cadre dominant dans le système de financement de la santé. »
Aujourd’hui membre dynamique du Comité consultatif externe sur l’accessibilité et le capacitisme systémique des IRSC, Danielle Peers était au nombre des universitaires s’identifiant comme personnes en situation de handicap qui ont écrit aux présidents des trois organismes, avant la création dudit comité en 2022, pour souligner la nécessité d’améliorer l’accessibilité et d’éliminer le capacitisme systémique dans le système de financement de la recherche au Canada.
« J’ai trouvé très impressionnante la rapidité avec laquelle les IRSC ont agi sur la question, tout comme le leadership incroyable instauré à la tête du Comité. Quand j’ai vu que sa coprésidence serait assurée par le Dr Mahadeo Sukhai [vice-président à la recherche et aux affaires internationales et dirigeant principal de l’accessibilité à l’Institut national canadien pour les aveugles], j’ai su qu’il s’agirait d’un comité extraordinaire en mesure d’accomplir de grandes choses », affirme Danielle Peers, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en culture du handicap et en culture du mouvement, et membre du corps des professeurs agrégés de la Faculté de kinésiologie de l’Université de l’Alberta.
Lutter contre le capacitisme systémique
L’amélioration de l’ est une priorité pour Danielle Peers, qui estime cependant que le Comité a un rôle encore plus important à jouer dans la lutte contre le capacitisme au sein du système ou des établissements. Il s’agit d’abolir les politiques, les lois, les règlements et les pratiques qui empêchent la pleine participation des personnes en situation de handicap en les privant notamment d’une égalité des chances et donc, à l’origine de leur discrimination fondée sur la supposition qu’elles sont moins aptes que d’autres.
« Il est essentiel, si on ne se contente pas de faire le strict minimum pour respecter les normes, de cerner les obstacles qui empêchent les gens non seulement de se lancer dans la recherche, mais de s’épanouir au sein du système et de bénéficier d’un appui sans réserve pour leurs travaux. »
Pour ce faire, il faut commencer par éliminer des obstacles importants, en veillant d’abord à ce que les communications et les processus entourant les possibilités de financement soient accessibles à l’ensemble de la population, ou encore, en faisant en sorte que les chercheurs ayant un handicap n’aient plus à puiser dans leurs subventions pour payer les coûts liés à l’accessibilité, comme des services d’interprétation en langue des signes ou l’accessibilité de moyens de transport.
« Trop souvent, j’ai dû payer pour des mesures d’adaptation à même les fonds de mes subventions, affirme Danielle Peers. Si j’ai une subvention de 30 000 dollars pour la recherche, il se peut que j’aie à en dépenser 10 000 pour pouvoir mener mes recherches en tant que personne handicapée, avec des stagiaires qui le sont aussi, dans des milieux universitaires capacitistes qui ne sont pas conçus pour nous. »
Créer des milieux inclusifs pour tout le monde
La recherche de Danielle Peers s’articule autour de trois domaines, à savoir l’activité physique adaptée, les études socioculturelles sur le sport et le mouvement ainsi que les études critiques sur le handicap.
Par exemple, Danielle Peers assure la codirection de Just Movements CreateSpace (en anglais seulement), qui adopte des approches fondées sur les arts et la justice pour les personnes en situation de handicap afin de générer et de mettre en commun des connaissances sur les corps en mouvement, que ce soit sous la forme de loisirs, d’activités récréatives, de sports, d’arts d’interprétation ou de pratiques spirituelles. Danielle Peers est également l’une des figures de proue du Re-Creation Collective (en anglais seulement) financé par le Conseil de recherches en sciences humaines, un regroupement de gens diversifiés – handicapés, fous (en anglais seulement), autochtones, racisés ou nouveaux arrivants – qui s’emploient à relever les politiques et les pratiques qui favoriseront la participation intégrale, significative et affirmative des personnes privées d’équité dans le sport et les loisirs.
« Une grande partie de mes recherches consiste à reconnaître, à mettre en commun ou à encourager de nouvelles pratiques inventées par les communautés de mouvements, d’artistes ou d’universitaires axées sur le handicap afin d’élargir les possibilités de participation significative pour tous. »
Un autre volet de recherche consiste à étudier la façon dont le sport organisé pour les personnes en situation de handicap au Canada favorise ou limite la participation d’un large éventail de personnes en telle situation. Par exemple, en tant que personne queer ayant un handicap, Danielle Peers rencontre d’importants obstacles dans la participation à la plupart des sports organisés.
« Comme je suis une personne non binaire avec un handicap, je ne peux pas participer aux sports destinés aux personnes queers en raison de la rareté des programmes prévus pour les personnes en situation de handicap, souligne Danielle Peers, qui a fait partie de l’équipe de basketball en fauteuil roulant et a aidé le Canada à remporter la médaille de bronze aux Jeux paralympiques de 2004 et la médaille d’or aux Championnats du monde de 2006. C’est la même chose en ce qui concerne les sports conçus pour les personnes en situation de handicap, où il y a traditionnellement eu peu d’espaces sûrs pour les personnes transgenres et non binaires. Ces possibilités en silos font en sorte d’exclure partout les personnes qui ont plus d’une identité. »
« Nous devons commencer à réfléchir à des types d’obstacles, plutôt qu’insister sur les types de personnes », précise Danielle Peers. Par exemple, l’aménagement normatif des vestiaires crée souvent des obstacles de taille pour de nombreuses communautés, notamment les personnes en situation de handicap ainsi que celles trans, non binaires ou de confessions religieuses diverses, en plus de toutes les personnes au carrefour de ces identités. »
« Il incombe d’ouvrir l’accès à l’ensemble de nos activités, pratiquées à des fins récréatives de surcroît, au plus grand nombre possible de personnes, ajoute Danielle Peers. Nous cherchons dans nos travaux une approche à l’égard des politiques, des pratiques et de l’éducation qui favorise la création de milieux où toute personne – handicapée, transgenre, non binaire, racisée ou autochtone – puisse s’épanouir. »
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