Pour y voir plus clair : causes génétiques de l’échec de la reproduction chez la femme et soins personnalisés pour les grossesses môlaires
Dre Rima Slim, chercheuse principale à l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill
« Nous avons pour objectifs d’approfondir les connaissances sur l’échec de la reproduction chez la femme et de promouvoir l’utilisation de la médecine de précision dans les milieux cliniques pour diagnostiquer cette affection et adapter la prise en charge des patientes à leurs défauts génétiques exacts. L’aspect le plus gratifiant de mon travail est d’aider les patientes directement ou indirectement en permettant à leur médecin de suivre l’actualité de la génétique en ce qui a trait à ce problème de reproduction. »
L'échec de la reproduction touche 10 à 15 % des couples dans le monde et se manifeste par l'infertilité, de fausses couches ou des grossesses môlaires (grossesses sans embryon) à répétition. Or, les causes génétiques de ces échecs ne sont pas bien comprises, car elles sont complexes et varient d'un cas à l'autre.
Une grossesse môlaire, également appelée môle hydatiforme, survient lorsqu'après la fécondation, l'embryon cesse de se développer, mais le tissu qui forme normalement le placenta prolifère excessivement. La forme sporadique de la môle hydatiforme se produit dans environ 1 grossesse sur 600 dans les pays occidentaux. Il s'agit de la tumeur trophoblastique la plus fréquente, mais elle est bénigne dans la majorité des cas. Cependant, approximativement 15 % des patientes peuvent nécessiter une chimiothérapie, et dans de rares cas, les grossesses môlaires peuvent devenir malignes et exiger des traitements plus énergiques. Sans traitement, les môles malignes peuvent entraîner de sérieux problèmes de santé, voire la mort.
Il existe deux types de grossesses môlaires sporadiques : complètes et partielles. Les grossesses môlaires complètes ne contiennent pas de matériel génétique de la mère et résultent de la fécondation par un ou deux spermatozoïdes. Cependant, jusqu'à tout récemment, on ne savait pas quand ni comment l'ovule perd son matériel génétique. Dans le cas d'une grossesse môlaire partielle, un ovule contenant 23 chromosomes est fécondé par deux spermatozoïdes, ce qui donne un embryon avec trop de chromosomes (69 chromosomes ou triploïdie).
Les recherches montrent que les personnes ayant eu une môle hydatiforme ont un risque de 1 à 4 % d'en avoir une autre. Il est aussi connu que la récurrence de môles diploïdes biparentales (deux jeux de chromosomes, un de chaque parent) est souvent liée à une seule anomalie génétique. C'est pourquoi l'identification du gène défectueux à l'origine des grossesses môlaires récurrentes est importante pour la prise en charge des patientes, la prévision des risques de récidive, l'orientation du conseil génétique et l'adaptation des techniques de procréation assistée aux besoins de chaque patiente.
La professeure Rima Slim, chercheuse principale à l'Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill, dirige des recherches axées sur l'identification des gènes et des mécanismes à l'origine de différents types d'échec de la reproduction chez la femme, notamment les grossesses môlaires et fausses couches récurrentes et l'infertilité. Son équipe a identifié le premier gène à effet maternel, NLRP7, responsable des môles diploides biaprentales récurrentes, et que la sévérité des défauts de ce gène chez les patientes est inversement corrélée à la differentiation des tissues embryonnaires de la conceptionet est favorable à la prolifération des cellules placentaires. En collaboration avec le professeur Jacek Majewski, expert en analyse génomique à haut débit, l'équipe a aussi identifié trois autres gènes, MEI1, TOP6BL et REC114, qui causent des grossesses môlaires androgénétiques récurrentes (sans chromosomes maternels). L'équipe a ensuite poussé les recherches, avec l'aide de la professeure Teruko Taketo, spécialiste de l'ovogenèse chez la souris, en utilisant des souris ayant un gène MEI1 défectueux pour étudier le mécanisme des grossesses môlaires androgénétiques. Conclusion : les ovocytes de ces souris perdent tous leurs chromosomes en les expulsant avec le fuseau méiotique dans les premiers globules polaires.
Le but du groupe de recherche de la Dre Slim est d'améliorer la compréhension de la génétique des échecs de la reproduction chez la femme et d'utiliser ces connaissances pour créer de nouveaux tests ADN afin de diagnostiquer ces affections. Ainsi, les patientes au Canada et dans le monde entier pourront bénéficier de soins personnalisés en fonction de leur profil génétique après un test pour les mutations des gènes NLRP7, MEI1, TOP6BL et REC114. Pour les patientes qui possèdent deux copies défectueuses de ces gènes, les chances d'avoir des enfants avec leurs propres ovules sont très faibles, et les techniques de procréation assistée avec leurs ovules sont vraisemblablement inutiles. Cependant, les patientes avec deux copies défectueuses du gène NLRP7 peuvent encore avoir des enfants grâce à des dons d'ovules.
L'équipe de la Dre Slim collabore étroitement avec les patientes, les cliniciens et les conseiller(ère)s en génétique à tous les stades de ses projets. Elle recrute actuellement des patientes ayant eu au moins deux grossesses môlaires (tous types inclus), au moins cinq fausses couches sans naissance vivante ou au moins cinq ans d'infertilité sans naissance vivante. L'objectif de ce nouveau projet est de trouver d'autres gènes liés à toute forme d'échec de la reproduction.
Coordonnées pour les patientes intéressées : rrw@muhc.mcgill.ca.
Site Web de la Dre Rima Slim (en anglais seulement)
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